18

À deux heures de l’après-midi, les portes de la brasserie s’ouvrirent à la volée, et Floyd leva les yeux comme il l’avait déjà fait plusieurs dizaines de fois depuis qu’il avait commandé son dernier café ; chaque fois que les clients entraient et sortaient, en fait. Il y avait trois autres tasses vides sur sa table, ainsi qu’un verre de bière et les miettes de ce qui avait dû être un sandwich indéfinissable, particulièrement rassis. Il pleuvait toujours, dehors, et une gouttière percée déversait une cataracte sur le montant de la porte. Les clients se faisaient saucer en entrant et en ressortant, mais personne n’avait l’air de se plaindre. Même Greta, lorsqu’elle arriva, parut davantage soulagée de le trouver encore là qu’ennuyée par le temps.

— Je pensais que tu serais déjà parti, dit-elle en secouant son parapluie.

Elle était trempée, et dans ses cheveux frisottés perlaient des petites gouttes de pluie.

— Je me suis dit qu’il valait mieux ne pas changer notre rendez-vous, dit Floyd.

Il enleva le pardessus qu’il avait posé sur la chaise, en face de lui, pour que personne ne s’asseye à sa table. Il voulait avoir une bonne vue de la devanture et de l’hôtel en face, pour ne pas rater Verity Auger si elle entrait ou sortait.

— Mais je dois admettre, poursuivit-il, que je commençais à me demander si je n’avais pas choisi la mauvaise brasserie. Que s’est-il passé ?

— Elle est partie, répondit Greta en s’installant avec un soulagement visible. Je n’avais pas plus tôt raccroché que je l’ai vue quitter l’hôtel.

— Tu veux boire quelque chose ?

— Je tuerais pour un café !

Floyd fit signe au garçon et passa commande.

— Alors raconte-moi ce qui s’est passé. Donc, tu l’as suivie. À ton avis, elle a quitté l’hôtel pour de bon ?

— Non. Elle n’avait pris que son sac à main. Pour ce que j’en sais, elle aurait pu revenir cinq minutes plus tard. Mais je ne pouvais pas courir ce risque.

— Tu as bien fait. Tu as réussi à la suivre ?

— Je pense que je m’en suis mieux tirée que ce matin. J’ai gardé mes distances, et j’ai essayé de changer de look tous les pâtés de maisons ou à peu près : en repliant mon parapluie, en mettant mon chapeau, mes lunettes, ce genre de trucs. Je ne pense pas qu’elle m’ait repérée.

Greta sucra son café et l’avala quasiment d’une seule gorgée.

— Où est-elle allée ?

— Je l’ai suivie jusqu’à Cardinal-Lemoine. Et c’est là que je l’ai perdue.

— Perdue ? Comment ça ?

— Accroche-toi, dit Greta. Je suis descendue derrière elle dans le métro. Je l’ai suivie jusque sur le quai, en restant à distance. Je me suis cachée derrière un distributeur automatique. Une rame est arrivée, puis une seconde. Elle n’a pris aucune des deux.

— Bizarre, dit Floyd.

— Moins que ce qui est arrivé après. Elle a disparu, comme ça. En un clin d’œil. Un instant, elle était sur le quai, et le suivant elle n’y était plus.

— Et aucune rame n’était arrivée ?

Greta baissa la voix, comme si elle avait bien conscience de l’absurdité de son récit :

— Non. Et il n’y a pas d’autre issue par où elle aurait pu sortir. Il aurait fallu qu’elle passe devant moi.

Floyd fixait sa tasse de café du regard. Après la quatrième tasse, il avait cessé de le savourer, il le buvait mécaniquement, comme un médicament censé l’aider à rester en éveil.

— Elle n’a pas pu s’évaporer.

— Je n’ai jamais dit ça. C’est l’impression qu’on aurait pu avoir, mais il y avait quelques autres personnes sur le quai. J’ai décidé que je n’avais plus rien à perdre, et je leur ai demandé s’ils avaient vu quelque chose.

— Tu as bien fait, répondit Floyd. Alors, qu’est-ce que ça a donné ?

— Eh bien, au moins l’un des témoins était sûr d’avoir vu Auger descendre sur les rails et disparaître dans le tunnel au bout du quai.

Floyd ingurgita l’information en même temps que son café, qu’il vida jusqu’à la dernière goutte.

— Il y a quelque chose dans le métro, à Cardinal-Lemoine. Blanchard nous avait dit qu’il avait vu Susan White se conduire bizarrement du côté de cette station. Il l’avait vue y entrer avec une grosse valise et en ressortir un peu plus tard avec une valise vide. Ça ne peut pas être une coïncidence.

— Mais pourquoi une femme disparaîtrait-elle dans un tunnel de métro ?

— Pour la même raison que n’importe qui d’autre : il y a, dedans, quelque chose d’important pour ces gens-là.

— À moins qu’ils ne soient tous dingues, objecta Greta.

— On ne peut pas exclure cette possibilité non plus. Tu l’as vue ressortir ?

— J’ai attendu trois quarts d’heure. Il y a eu une sorte d’interruption du service pendant quelques minutes, et puis les rames ont recommencé à circuler normalement. Plusieurs dizaines de rames sont passées comme ça. Personne n’est ressorti du tunnel.

— Et personne n’a pensé à signaler l’incident au personnel de la station ou à la police ?

— Pas le type auquel j’ai parlé, en tout cas, répondit Greta. Ce n’était pas le genre à tenter une démarche aussi responsable.

Floyd demanda l’addition.

— D’accord. D’après moi, pour retrouver Auger, il y a deux solutions : on peut couvrir l’hôtel, au cas où elle y reviendrait, ou on peut couvrir la station Cardinal-Lemoine dans l’espoir qu’elle ressorte du tunnel, ou qu’elle y retourne, dans l’hypothèse où elle en serait ressortie sans qu’on la voie.

— Et la prochaine station sur la ligne ? Si elle avait marché jusque-là ?

— J’espère qu’elle n’a pas fait ça. Ça aurait encore moins de sens que de descendre dans le tunnel, déjà, pour commencer. Je ne peux que supposer qu’elle a déposé ou pris quelque chose dans le tunnel.

— Tu parles de « couvrir » ces endroits, comme si on disposait d’une main-d’œuvre illimitée, dit Greta. Alors qu’en fait on est deux, et que l’une de ces deux personnes doit s’occuper de sa tante.

— Je sais, répondit Floyd. Et je ne te demande plus rien. Ce que tu as déjà fait m’a beaucoup aidé.

— Sauf que je l’ai perdue, répondit Greta.

— Non. Tu as démontré que les faits et gestes de Verity Auger ne collaient pas avec son histoire. Jusque-là, il y avait encore une faible chance qu’elle ait vraiment été la sœur de Susan White.

— Et maintenant ?

— Maintenant ? Je parierais que nous avons affaire à deux espionnes.

— Là, tu t’avances, objecta Greta. Si Custine était là, il te dirait exactement comme moi : prends tout ce que tu sais, va trouver les gens qu’il faut et raconte-leur tout. Ils n’ont rien contre toi, Floyd.

— Il faut que je tire Custine d’affaire. Et la seule façon de le faire, c’est de suivre cette femme.

— Elle t’a tapé dans l’œil, hein ?

— Pas mon genre, répondit Floyd en récupérant son manteau.

— N’empêche qu’elle t’a tapé dans l’œil.

Floyd secoua la tête en riant. Et en évitant le regard de Greta.

 

Dans la bulle de verre armé de la nacelle de récupération, les voyants de la capsule de transit clignotaient avec une régularité hypnotique.

— Ça tourne, dit Skellsgard, appuyée contre une console au niveau supérieur. Vous êtes sûre de vouloir faire ça, Auger ?

— Dites-moi ce que je dois faire, c’est tout. Je m’occuperai du reste.

La nacelle rayée commença à pivoter de cent quatre-vingts degrés. Par contraste avec les machines étincelantes qui l’entouraient, le module de transfert faisait figure de relique invraisemblablement esquintée, digne d’un musée d’histoire de l’espace : le genre de capsule qui aurait sillonné le vide intersidéral, pilotée par des hommes à poigne qui comptaient sur la détermination et des calculs rudimentaires pour rentrer chez eux. Auger savait que le module s’était ainsi déglingué au cours d’un unique transfert d’un portail à l’autre, et que, le temps d’émerger sur Phobos, d’ici une trentaine d’heures, il serait à peu près deux fois plus amoché.

Skellsgard passa en revue les options affichées sur un moniteur.

— Le module a l’air en assez bon état, conclut-elle. Heureusement, parce que nous avons assez de problèmes avec le sphincter pour ne pas avoir besoin de nous préoccuper aussi de ça.

— Vous croyez que vous tiendrez le coup ?

Skellsgard hocha la tête.

— J’y arriverai. De toute façon, je n’ai pas le choix.

— C’est comme ça que nous devons faire, dit Auger. Mais j’ai hâte que vous envoyiez l’équipe de secours, lorsque vous aurez réussi à traverser.

— Ils repartiront le plus vite possible. Vous avez ma parole.

— Parfait. Bon, je vais vous aider à vous installer.

Auger aida Skellsgard à grimper sur la passerelle qui permettait d’accéder au sas étanche encastré dans la coque de la bulle de récupération. Elle remarqua que la blessée s’affaiblissait : malgré les soins qu’elle avait pu lui administrer grâce à la trousse de premiers secours, elle semblait sur le point de perdre conscience. Auger espérait seulement pouvoir la faire partir avant. Et aussi qu’en refaisant les manœuvres requises elle empêcherait le sphincter de se refermer.

La porte du sas pivota sur des charnières activées par de gros pistons. Auger se rappelait à peine s’être traînée hors du module, il y avait une éternité de cela, à ce qu’il lui semblait. Elle aida, avec toute la délicatesse possible, Skellsgard à franchir le sas puis la passerelle de connexion pressurisée qui menait à la capsule en attente.

— Je devrais peut-être vous mettre une attelle à la jambe avant de vous attacher, proposa Auger.

— Pas le temps. Je ne veux pas retarder votre récupération d’une seconde. Et puis, ils m’ont bien amochée, mais je ne pense pas avoir quoi que ce soit de cassé. Arrêtez de vous en faire pour moi, d’accord ? Vous en avez déjà assez fait.

Auger avait constaté, lors du voyage aller, que le module était équipé de couchettes anti-g pour trois personnes. Fermant ses oreilles aux gémissements de douleur de Skellsgard, elle l’aida à s’allonger sur la couchette de droite, boucla soigneusement les sangles qui la retenaient et déploya les consoles de navigation et de communication. Puis, pensant que Skellsgard n’aurait pas la force de se traîner vers les minuscules toilettes, elle tendit la main vers un écheveau de cathéters.

— Vous voulez que je vous connecte avant votre départ ?

— Je m’en sortirai, répondit Skellsgard en faisant la grimace. Et même si je n’y arrive pas, ma dignité ne devrait pas trop en souffrir. Vous avez réfléchi à ce que je devrai dire à Caliskan en arrivant ?

Auger fouilla dans sa veste et en sortit l’unique bout de papier qu’elle avait réussi à sauver des pseudo-enfants.

— Vous pouvez patienter encore une minute ? Je voudrais lui mettre un mot.

— Au cas où je serais dans le coma à l’arrivée ?

— Ce n’est pas à exclure, mais je voudrais aussi prendre des notes pour moi.

Auger ressortit du module et retourna vers l’une des consoles, où elle avait repéré un bloc et un stylo. Sur une feuille, elle décrivit rapidement tout ce qu’elle se rappelait des documents de Susan White. Puis elle déplia la lettre de l’aciérie de Berlin qu’elle avait récupérée dans le tunnel et recopia sur une autre feuille l’adresse de l’usine et le nom de l’homme qui avait écrit à White. Ensuite, elle regagna la capsule, où elle fut soulagée de retrouver Skellsgard encore consciente.

— C’est le seul document que le bébé de guerre n’a pas fauché dans le tunnel, dit-elle en repliant le papier sur lequel elle avait noté ses observations et en glissant les deux feuilles dans la poche poitrine de Skellsgard. C’est tout ce qui me revient pour l’instant. Ce n’est pas énorme, mais peut-être que Caliskan arrivera à comprendre ce qui se passe. Et puis j’en saurai peut-être un peu plus quand je reviendrai de Berlin.

— Qui a parlé de Berlin ?

— Je vais suivre l’une des pistes que Susan White n’a pas eu le temps d’explorer elle-même.

Skellsgard secoua la tête d’un air réprobateur.

— C’est extrêmement dangereux. À Paris, on n’est jamais à plus d’une heure du portail. Mais de Berlin, combien de temps vous faudra-t-il pour revenir si quelque chose cloche ?

— Aucune importance. Le portail ne me servira à rien tant que le module ne sera pas revenu. Et je devrais pouvoir aller à Berlin et en revenir largement à temps.

— Vous voulez dire que vous n’en êtes pas absolument sûre ?

— Je n’ai pas eu le temps de programmer ça en détail, reprit Auger. Mais ce que je sais, c’est qu’il y a une piste à Berlin, et que Susan l’aurait suivie si elle ne s’était pas fait tuer. Je lui dois bien de faire le maximum. Il y a un train de nuit qui part ce soir, et j’ai l’intention de le prendre. Je serai à Berlin demain matin, et avec un peu de chance je serai rentrée le soir même.

— Avec un peu de chance, releva Skellsgard.

— Écoutez, ne vous en faites pas pour moi. Rentrez chez vous et remettez ça à Caliskan en mains propres. J’ai l’impression que la lettre est plus importante que nous ne le pensons.

Skellsgard serra la main d’Auger.

— Vous n’êtes pas obligée de me renvoyer à votre place, mais j’apprécie. C’est courageux, ce que vous faites.

Auger prit l’autre main de la femme et la serra à son tour.

— Ce n’est pas un gros sacrifice, vous savez. Ça me permettra de voir un peu plus de ce monde avant d’en repartir pour de bon.

— Pour un peu, je vous croirais.

— Non, vraiment, c’est ce que je pense. Il y a une partie de moi qui voudrait bien repartir avec vous, dans cette capsule, mais une autre partie n’a qu’une envie : s’immerger le plus possible dans T2. J’en ai à peine effleuré la surface, Skellsgard. Et aucun de nous n’en a fait davantage.

— Faites bien attention à vous, Auger.

— Ne vous inquiétez pas pour moi. Bon, on va vous enfermer, maintenant, et mettre ce fourbi en route.

Auger recula vers le sas.

— Vous avez compris le réglage du sphincter ?

— Si ça secoue un peu, vous saurez pourquoi.

— Toujours aussi réconfortante…

Auger repoussa la porte et recula alors que les servomoteurs achevaient la manœuvre de fermeture. Quelques pouces de métal blindé la séparaient maintenant de Skellsgard, et elle se sentit tout à coup beaucoup plus seule. Elle retraversa le sas, puis effectua la séquence de commande de déconnexion ombilicale, qui s’achevait par la rétraction de la passerelle. Derrière le hublot rayé et étoilé ménagé dans la paroi du module, elle vit une dernière fois Skellsgard, qui levait le pouce à son intention. Auger retourna vers le cercle principal de consoles et essaya de se vider complètement l’esprit de tout ce qui n’était pas les étapes nécessaires au lancement du module.

Aucune des phases de la procédure n’était particulièrement compliquée. La stabilisation initiale du sphincter et le lancement étaient gérés par une routine préprogrammée qui se déroula exactement comme prévu. Dans les structures de bronze translucides de machinerie non humaine, les étincelles et les filaments de lumière ambrée en lévitation accélérèrent imperceptiblement leur mouvement. Sur les grumeaux et les plaques environnantes de mécanismes humains, les voyants rouges et verts clignotèrent et vacillèrent, et des écrans affichèrent des données numériques. Sur la console, devant elle, les aiguilles des cadrans analogiques passèrent au rouge, mais elle savait que ça pouvait arriver, et elle ne s’inquiéta pas exagérément. Sous ses pieds, la passerelle en caillebotis entra en vibration. Elle augmenta l’énergie du sphincter, et une caisse à outils en métal tomba d’une console, au milieu de la pièce, répandant son contenu de clés et de pinces et la faisant sursauter.

Sur la console, des lumières passèrent l’une après l’autre à l’orange, en séquence : le lien était maintenant suffisamment ouvert pour laisser passer le module. Les index de tension géodésique étaient assez bas pour ne pas le déchiqueter, pourvu qu’il plonge tout droit au milieu sans effleurer les parois.

Auger trouva des lunettes protectrices et inclina la tige d’un micro vers sa bouche.

— Skellsgard ? Vous me recevez ?

Un haut-parleur protégé par une grille situé au milieu de la console lui renvoya sa réponse, noyée dans un bourdonnement. Elle paraissait ténue et lointaine, comme si elle était à des centaines de kilomètres de là :

— Vu d’ici, tout a l’air OK. Finissons-en.

Auger vérifia que les voyants orange étaient fixes.

— Injection dans cinq secondes…

— Épargnez-moi le compte à rebours. Faites-le, c’est tout.

— Allez, c’est parti !

Le mouvement fut plus violent qu’Auger ne l’avait anticipé ; la nacelle fit un soudain bond en avant, propulsant le module de plus en plus vite. En un clin d’œil, nacelle et module eurent quitté le globe principal de la bulle de récupération, faisant craquer toute la structure. Auger regarda la nacelle se ruer comme une torpille dans le tunnel d’injection tapissé de miroirs. Deux ou trois secondes plus tard, elle arrivait à la limite du rail de guidage et s’arrêtait net, projetant le module devant elle sur l’arc paresseux d’une trajectoire balistique. L’embouchure du trou de ver, maintenant révélée par l’ouverture de l’iris, était un vortex de décharges d’électricité statique béant comme la gueule d’une étoile de mer. Des bras munis de ressorts jaillirent de la carlingue du module et rebondirent sur les parois incurvées, crachant des volutes de lumière et de métal en fusion. Un instant plus tard, les lambeaux de métal tordus comme de la guimauve se détachèrent, mais ils avaient rempli leur office. Dans une gerbe finale d’étincelles dorées, la capsule acquit une accélération phénoménale, se réduisant en un clin d’œil à un point lumineux.

Tout autour d’elle, des sirènes d’alarme retentirent, des lumières flashèrent. Une voix enregistrée commença à répéter un message où il était question de niveaux de puissance impossibles à maintenir. Malgré le vacarme, elle entendit une voix lointaine :

— Auger… vous me recevez ?

Auger se rapprocha du micro et regarda sa montre.

— Eh bien, vous avez réussi à partir. Comment c’était ?

— Intéressant.

La voix de Skellsgard était déjà hachée, réduite à un filet. Communiquer par le lien était assez difficile quand il n’y avait pas de module en transit dedans, et quand il y en avait un c’était quasiment impossible.

— Skellsgard, je ne sais pas si vous m’entendez, mais je vais amorcer la restriction contrôlée du sphincter d’ici quinze secondes…

En guise de réponse, le micro émit un craquement inintelligible. De toute façon, ça n’aurait rien changé. Les dés étaient jetés.

Elle descendit l’escalier en spirale qui menait à la console inférieure, regarda à nouveau sa montre et commença à diminuer l’énergie stabilisatrice, comme le lui avait montré Skellsgard. Bientôt, les sirènes, les éclairs stroboscopiques et les messages d’avertissement s’estompèrent, la laissant seule dans le chaud bourdonnement de la machinerie environnante. Les étincelles et les filaments ambrés avaient disparu. Elle remonta au niveau supérieur et scruta les profondeurs du sphincter : il n’y avait pas trace du module qui venait de partir, la nacelle regagnait la bulle de récupération, et un mécanisme de balayage circulaire débarrassait le tube des débris des bras de guidage abandonnés à l’intérieur.

— Skellsgard ? Maurya ? appela-t-elle dans le micro.

Pas de réponse.

Skellsgard enverrait peut-être un signal par le lien après son arrivée, mais selon toute vraisemblance Auger ne saurait si elle était bien rentrée qu’en voyant un nouveau module tomber dans la bulle.

Et à ce moment-là elle voulait être revenue de Berlin.

 

Le troisième passage d’Auger par la censure fut aussi peu spectaculaire que les deux précédents. Après un frisson, elle se redressa et rassembla quelques objets utiles pour la suite de sa mission : une torche en état de marche, des vêtements propres et des liasses de monnaie locale qu’elle fourra dans une mallette rouge. Elle avait récupéré l’automatique de Skellsgard et trouvé un chargeur plein sur une étagère, dans la salle de la censure. Il était maintenant dans son sac à main, avec l’arme du bébé de guerre. Elle appréciait de se sentir armée pour entreprendre le lent et sale trajet de retour dans la station. Dix minutes plus tard, elle entra dans le tunnel du métro, sa torche arrachant des reflets aux rails électrifiés, mortels.

Sa respiration se bloqua dans sa gorge.

Elle avait juste oublié un léger détail…

Aveling et les autres ayant disparu, il n’y avait plus personne pour couper l’alimentation électrique, le temps qu’elle sorte du tunnel. Or les trains ne cesseraient de circuler pour la nuit que d’ici une douzaine d’heures, et comment sortirait-elle de la station, qui serait alors fermée ? Si elle ne pouvait s’échapper avant la réouverture du métro, le lendemain matin, elle aurait perdu près d’une journée sur les soixante heures dont elle disposait avant le retour du module. Elle pourrait sûrement trouver un moyen de couper le courant en provoquant un court-circuit, mais elle ne pourrait pas le rétablir quand elle serait sortie du tunnel. Et il était trop risqué de ne pas le rétablir : il ne manquerait plus que les ingénieurs du métro fourrent leur nez dans le tunnel, et qu’ils découvrent l’entrée de la galerie qui menait au portail.

Auger laissa passer une rame, recroquevillée dans le tunnel secondaire, encaissant la gifle d’air chaud générée par la motrice. Elle vit les lumières des voitures se ruer à quelques centimètres de son visage. Une autre rame arrivait dans l’autre sens en rugissant. Elle était à peu près vide. L’heure de pointe était passée, mais les rames continuaient à circuler sur le même rythme. Auger maudit l’organisation du métro pour son dévouement et son efficacité aveugles.

Elle n’avait pas le choix : elle devait tenter sa chance. Elle estima qu’elle avait une minute et demie devant elle pour arriver à Cardinal-Lemoine, deux si elle avait de la chance, en espérant qu’elle ne trébucherait pas ou qu’elle ne se ferait pas piéger dans le tunnel si une rame passait plus tôt que prévu.

Finissons-en, se dit-elle.

Elle s’élancerait dès que la rame suivante serait passée. Elle banda ses forces. Une minute plus tard, aucune rame n’était passée, d’un côté comme de l’autre. Une autre minute s’écoula encore, puis une troisième. Au bout de cinq minutes, elle entendit enfin une rame approcher dans un concert de grincements et de bruits de ferraille. Au cours de ces cinq minutes, elle aurait eu amplement le temps de rejoindre la station. Les trains suivants recommencèrent à se succéder à la cadence d’un toutes les deux minutes à peu près.

Inutile d’attendre davantage.

Alors que les lanternes rouges de la dernière rame disparaissaient dans le tunnel devant elle, elle se mit en route.

Elle avançait, le dos collé au mur, ses vêtements se prenant dans le magma de tuyaux et de câbles électriques noirs de crasse fixé sur la paroi. Elle tenait sa mallette derrière elle, la soulevant aussi haut que ses forces le lui permettaient. Elle ne pouvait s’empêcher de heurter le mur et de s’érafler contre ses aspérités. Elle n’avait pas trébuché à l’aller, se disait-elle, et elle avait réussi à parcourir la distance pendant le temps qu’Aveling lui avait accordé. Rien n’avait changé, sauf que le châtiment pour le moindre faux pas risquait d’être plus sévère. Elle ne pouvait pas se permettre la moindre erreur : un pas de travers et c’en serait fini.

Passé une légère courbe, elle distingua devant elle la lueur froide de la station Cardinal-Lemoine. Elle semblait encore très loin, trop loin pour qu’elle y arrive pendant la minute qui devait lui rester. Elle paniqua. L’angoisse lui nouait la gorge, et elle dut se retenir de faire demi-tour et de repartir dans l’autre sens.

Non, s’ordonna-t-elle fermement. Continue à avancer.

Elle n’avait pas plus de chances d’arriver saine et sauve si elle repartait en sens inverse. Tous ses muscles crispés, posant un pied après l’autre, avec détermination, elle avançait, lentement mais régulièrement. Une rame passa, de l’autre côté, le souffle la plaquant un long instant contre la paroi. Elle se remit en marche, les yeux fixés sur la lumière, maintenant beaucoup plus vive, qui se reflétait sur les carreaux émaillés entourant l’ouverture du tunnel. Elle pouvait apercevoir les gens sur le quai d’en face. Personne ne l’avait encore remarquée. La valise rebondissait contre le mur, derrière elle, délogeant la crasse incrustée.

Puis les gens commencèrent à bouger sur le quai qui se trouvait de son côté et s’approchèrent du bord, comme mus par une décision prise collectivement.

Elle n’allait pas y arriver.

Presque aussitôt, les lumières vives d’une motrice apparurent à l’autre bout de la station. L’engin s’arrêta le long du quai, se figea pendant ce qui fit à Auger l’impression de n’être qu’une poignée de secondes et redémarra.

Alors que le train entrait dans son bout de tunnel, elle vit des arcs électriques danser entre les rails d’alimentation et le dessous de la motrice, des éclairs redoutables, bleu violacé, comme ceux qu’elle avait entrevus un moment plus tôt dans le sphincter du trou de ver. Le train oscillait et tanguait en approchant, semblant remplir toute la largeur du tunnel. Auger regretta de ne pas avoir fait plus attention en venant, de ne pas avoir repéré les niches et les anfractuosités de la paroi où elle aurait pu s’abriter. Elle n’avait plus qu’une chose à faire : rester parfaitement immobile, le dos collé au mur, épousant les creux et les bosses des tuyaux et des câbles qui s’enfonçaient dans sa colonne vertébrale comme autant d’instruments de torture médiévaux. Elle se plaqua encore plus fermement au mur, essayant de s’intégrer dans la structure, de s’y fondre, tel un reptile camouflé. La rame se rapprocha en rugissant, poussant devant elle une masse d’air qui fit voltiger des détritus. Des rats détalèrent dans les ténèbres. Elle pensa que le conducteur de la rame devait la voir, maintenant, mais la rame approchait toujours, son rugissement d’acier remplissant son univers comme un cri de guerre.

Auger ferma les yeux. Aucune raison de les garder ouverts jusqu’à la dernière seconde. Le rugissement atteignit un crescendo, elle eut l’impression d’avaler à pleins poumons des bouffées d’huile et de poussière. Elle éprouva une violente secousse dans le bras gauche, comme si le train le lui arrachait de l’épaule. Le rugissement se poursuivit, interminable, puis commença à diminuer. Des réverbérations suivirent le dernier wagon, le long du tunnel, et puis ce fut le silence, à nouveau.

Auger rouvrit les yeux et osa reprendre son souffle. Tout allait bien ; son bras était toujours attaché à son épaule, et n’avait même pas l’air disloqué. Mais sa valise gisait, éventrée, à une dizaine de pas de là. Les vêtements propres qu’elle avait préparés étaient répandus sur le ballast, maculés de crasse. Deux liasses de fausse monnaie gisaient, inaccessibles, entre les rails, et une troisième apparut, entre ses pieds, dans le pinceau lumineux de sa torche.

Auger récupéra la liasse de billets, son instinct lui commandant d’abandonner tout le reste et de ressortir du tunnel le plus vite possible. Quelqu’un – probablement un employé sous-payé du métro – profiterait d’un généreux bonus.

Elle arriva à l’entrée du quai juste au moment où une autre rame ralentissait et entrait dans la station Cardinal-Lemoine. Elle s’attarda dans le noir jusqu’à ce que la rame s’arrête et que les passagers, sur le quai, commencent à s’approcher des portes. Le conducteur, face à elle, prit un journal posé sur son poste de conduite, le retourna distraitement à la dernière page, prit un crayon sur son oreille et griffonna quelque chose.

Auger profita de ce moment d’inattention pour grimper sur le quai. Les passagers qui venaient de descendre de la rame se dirigeaient vers la sortie, à l’autre bout du quai, en petits groupes épars. Si elle arrivait à se fondre dans la masse, elle pourrait regagner la surface sans que quiconque s’avise qu’elle n’était pas descendue du métro. Mais elle avait une bonne distance de quai désert à parcourir avant de rejoindre la petite foule, et il y avait au moins quatre personnes assises là, contre les murs de la station, à attendre on ne savait quoi, et devant lesquelles il lui fallait passer sans se faire remarquer, en dépit de ses vêtements froissés et maculés.

Les portes se refermèrent dans un sifflement d’air comprimé, et le train se remit en branle. Auger s’avança aussi nonchalamment que possible sur le quai, déterminée à rejoindre ce qu’il restait de voyageurs sur le quai. Une fois à la surface, on la laisserait tranquille : encore une femme qui vivait des moments difficiles, quelqu’un à éviter à tout prix.

— Mademoiselle, par ici, s’il vous plaît, dit alors un homme, d’une voix calme mais autoritaire.

Elle se retourna et vit l’un des individus, jusque-là assis, se lever et s’approcher d’elle en enfonçant son chapeau sur sa tête avec détermination. Il avait laissé sur le banc le journal qu’il lisait et se révélait maintenant porter l’uniforme bleu marine des employés du métro.

— Pardon ? répondit Auger.

— Venez avec moi, mademoiselle. Nous voudrions vous poser quelques questions.

— Je ne comprends pas. Qu’est-ce que j’ai fait ?

— C’est ce que vous allez nous dire. Si vous voulez bien m’accompagner au bureau, ajouta-t-il en lui montrant une porte d’un vert éteint portant l’inscription ENTRÉE INTERDITE. Et pas d’esclandre, ça ne servirait à rien.

Elle ne bougea pas. C’était un petit bonhomme sans âge, à la moustache grisonnante et au nez bulbeux sillonné de veinules violacées. Auger se dit qu’il avait l’air de craindre qu’elle ne fasse une scène.

— Écoutez, je ne vois pas ce que…

— On nous a signalé tout à l’heure qu’une jeune femme se trouvait dans le tunnel, dit-il en baissant le ton. Nous étions dubitatifs, bien qu’il y ait au moins deux témoins. À titre de précaution, j’ai décidé de monter la garde moi-même, au cas où quelqu’un ressortirait du tunnel.

— Mais vous n’avez vu personne, insista Auger. Pas moi, en tout cas, je viens de descendre du train.

— Je sais ce que j’ai vu.

— Eh bien, vous vous êtes trompé, voilà tout.

Il se dandina d’un air incertain, se demandant sans doute s’il devait user de la force pour la persuader d’entrer dans la pièce ou appeler un collègue à la rescousse.

— Je vous en prie, ne compliquez pas la situation, dit-il. Nous serions en droit d’appeler la police. Mais une simple explication nous suffira peut-être, et nous pourrons en rester là.

— Il y a un problème ? demanda une autre voix, avec un accent différent.

Auger tourna la tête. Un autre passager s’approchait d’eux, les mains dans les poches d’un long pardessus gris. Il portait un chapeau au bord rabattu, mais elle le reconnut tout de suite :

— Wendell !

— Que se passe-t-il, Verity ?

Floyd semblait attendre qu’elle joue un rôle dont il était seul à connaître le scénario. En bafouillant, elle répondit :

— Je n’en ai pas la moindre idée. Cet homme voudrait m’emmener je ne sais où, je ne sais pourquoi.

Floyd examina l’employé avec une sorte d’attention patiente.

— Et pourquoi, au nom du ciel, pourriez-vous bien vouloir faire une chose pareille ?

— Vous connaissez cette dame, monsieur ?

— Si je la connais ? Je pense bien. C’est ma femme.

— Alors vous pourriez peut-être m’expliquer ce qu’elle faisait dans le tunnel.

— De quoi diable parlez-vous ? fit Floyd.

Il enleva son chapeau, lissa ses cheveux, en une parfaite expression d’incompréhension.

L’homme gratta son nez rougeaud, aux veinules éclatées.

— Je sais ce que j’ai vu. Il vaudrait peut-être mieux poursuivre cette conversation dans un endroit plus tranquille.

— Si vous voulez, répondit Floyd. Mais je vous assure que vous commettez une grossière erreur.

— Allez, Wendell, soupira Auger. Finissons-en, et peut-être que ce petit homme stupide nous fichera enfin la paix.

L’homme prit une clé au bout d’une chaîne, ouvrit la porte et les fit entrer dans un bureau Spartiate, presque vide. Une ampoule nue pendait au plafond, tel un appât pour un poisson-lune.

— Asseyez-vous, dit l’homme en indiquant une table de bois bancale et deux chaises de bureau qui avaient connu des jours meilleurs.

— Je resterai debout, si ça ne vous fait rien, dit Floyd. Écoutez, je vais vous expliquer. Il y a une demi-heure, j’ai reçu un coup de fil de ma femme. Elle travaille dans une mercerie, rue Gay-Lussac. Il y a toutes sortes de gens qui entrent dans la boutique, et il arrive que le personnel permette aux clients d’utiliser les toilettes à l’étage. Malheureusement, quelqu’un a laissé le robinet ouvert, l’eau a débordé sur le plancher… Si tu racontais à monsieur ce qui s’est passé, Verity ?

— L’eau a tellement coulé qu’elle a fait s’effondrer le plafond, enchaîna Auger. Le personnel qui travaillait en dessous a été trempé et couvert de poussière et de débris. C’est pour ça que vous me voyez dans cet état. Tout le stock est fichu. J’ai appelé mon mari et je lui ai dit qu’on nous renvoyait toutes à la maison plus tôt, et il est venu à ma rencontre… je ne tiens pas à me promener toute seule dans la rue, dans cette tenue.

— Vous n’êtes pas français, dit l’homme, comme s’il faisait part d’une grave nouvelle.

— Il n’y a pas de loi contre ça, que je sache, répondit Floyd. Vous voulez voir mes papiers ?

Il montra à l’homme sa carte d’identité et l’une des fausses cartes de visite prévues pour ce genre de circonstances.

— Comme vous voyez, je suis traducteur littéraire, ce qui veut dire que je passe le plus clair de mon temps chez moi. Allez, Verity, montre tes papiers au monsieur.

— Tenez, dit-elle après avoir fouillé dans son sac à main.

L’homme regarda ses papiers, remarqua les traces noires que ses doigts sales y avaient laissées.

— « Verity Auger », lut-il. Je n’oublierai pas votre nom. Et j’ai bien noté aussi que vous ne portez pas d’alliance.

Derrière la porte fermée, une rame entrait dans la station. Auger fut tentée de se précipiter pour monter dedans, mais elle craignait que le bonhomme n’empêche la rame de repartir.

— Écoutez, dit-elle, je vous dis la vérité, et mon mari aussi. Que voudriez-vous que je fasse dans un tunnel de métro ? Je trouve déjà assez pénible de prendre le métro ainsi accoutrée, et de me faire dévisager par tout le monde comme si j’étais une vagabonde…

— Je vous assure qu’il n’y a rien d’anormal, renchérit Floyd avec un sourire de premier de la classe. Comme vous le dit ma femme, elle n’est pas du genre à traîner dans les tunnels du métro.

— Quelqu’un y est pourtant bien entré, insista l’homme.

— Possible, dit Floyd d’un ton conciliant, mais vous ne pouvez pas soupçonner toutes les femmes qui descendant du métro couvertes de poussière.

— Je l’ai vue…, commença l’homme, dont le voix commençait à manquer de conviction. J’ai vu quelqu’un sortir de ce tunnel.

— Eh bien, dans la cohue des passagers qui allaient et venaient, vous avez dû perdre la trace de la personne en question, et finir par la confondre avec ma femme… Écoutez, poursuivit Floyd d’un ton compréhensif, je ne veux pas faire d’histoire, mais ma femme a vraiment besoin de rentrer à la maison, de faire un brin de toilette et de se changer. N’est-ce pas, chérie ?

Il lui prit la main. Il avait les doigts rugueux, mais sa poigne était douce.

— Je me demande si j’aurai encore du travail demain, répondit Auger. Le stock a vraiment l’air d’avoir subi de gros dégâts, tu sais.

— On parlera de ça plus tard, dit Floyd, qui ramena son attention vers l’employé. Tenez. Vous avez été très compréhensif. Voulez-vous accepter ceci comme gage de ma reconnaissance ?

Il prit un billet de dix francs dans la poche de son veston, le plia discrètement en deux et le fourra dans la poche poitrine de l’homme avec un naturel confondant.

— Votre reconnaissance ? Mais pour quoi ? Je n’ai rien fait.

— Ma femme est un peu ennuyée de l’aspect qu’elle offre, dit Floyd plus bas, d’un ton complice. Si vous pouviez nous laisser quitter la station par la sortie du personnel…

— Je ne peux pas…

Floyd glissa à l’homme un autre billet de dix francs.

— Je sais que c’est parfaitement irrégulier, mais nous apprécierions vraiment. Vous prendrez un verre à notre santé.

L’homme fit la moue, soupesant les possibilités. Il arriva très vite à une conclusion :

— Le stock est endommagé, vous dites ?

— On venait de tout faire venir de la réserve, ajouta Auger, manifestement désolée.

— J’espère vraiment, madame, que votre travail n’est pas menacé.

Il rouvrit la porte et les renvoya sur le quai.

— Par ici, dit-il en les conduisant vers une sortie.

— C’est vraiment gentil, dit Floyd. Nous n’oublierons pas.

— Vous pouvez être sûr que, moi non plus, je ne vous oublierai pas de sitôt, monsieur Floyd.

La pluie du siècle
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